30 novembre 2010

A l'intérieur

Le cinéma de genre en France a prouvé ces dernières années qu'il était bien là, comme une bête ronronneuse jamais vraiment endormie. Calvaire de Francis du Welz (2004), Frontière(s) de Xavier Gens (2007), ou l'excellent Martyrs de Pascal Laugier (2008), l'hexagone a de quoi se défendre en terme d'hémoglobine réfléchie. Et le succès est là, la toile semblant aimer la couleur rouge sang pour provoquer encore plus ses spectateurs victimes dans une quête barbare sinon masochiste de sa propre résistance morale. En 2004, deux jeunes réalisateurs passionnés se donnaient le paris d'un autre projet tout aussi radical, en misant notamment sur une promotion importante pour éviter la mort prématurée au cinéma, redoutée dans le genre plus qu'ailleurs.
Le scénario est loin d'être compliqué, loin d'être inefficace. Julien Maury et Alexandre Bustillo ont bien compris de leurs influences certainement nombreuses que la radicalité paye avant toute chose. Sarah, maman sous peu, peine terriblement à se relever d'une demi seconde qui a bouleversé sa vie, tué son homme et pété son pare-brise en mille morceaux. Sa mère, présente, beaucoup trop, n'est d'aucune aide psychologique. C'est malgré tout qu'elle attend la naissance de ce bébé miraculeusement épargné, malgré tout qu'elle passe le réveillon de Noël seule. Pas pour longtemps... Une mystérieuse femme s'introduit bientôt chez elle avec une seule obsession, un seul désir brûlant d'horreur : lui enlever le bébé du ventre à coups de ciseaux aiguisés.
A l'intérieur, a bien sûr une lecture plurielle. A l'intérieur de ce ventre bien sûr, où attend naïvement la vie un bébé condamné, mais aussi à l'intérieur de cette maison cloisonnée, étouffante. Le huit-clos s'impose, terni d'une photographie brumeuse aux couleurs chaudes et sombres. N'espérez pas y voir le moindre réconfort : la photographie a surtout cette incroyable particularité de ne rendre le sang que plus rouge, que plus réel et omniprésent. Maury et Bustillo ne sont pas des touristes curieux, ils sont là pour frapper où ca fait mal. Enchainant les séquences gores à limite du soutenable, le film est une démonstration d'épouvante aggravée... et d'effets spéciaux manuels. Sensationnels, le maquillage et les trucages lui donnent une authenticité écœurante. Les deux actrices aussi. Habitées, Alysson Paradis et Béatrice Dalle ne jouent plus mais hantent le film de la violence de leurs corps, de leurs visages et de l'expression bestiale de leur gorge. Les paroles, et même les cris, sont de façon intéressante épurés pour éviter le cliché. La voix frappe lorsque la douleur inonde... douleur qui semble s'effacer peu à peu, pour friser bientôt le fantastique où la barbarie devient un véritable exercice esthétique. Le final d'une poésie et d'une cruauté cruellement antithétiques – le dernier plan du berceau est un chef d'œuvre – conclue A l'intérieur dans une empathie provocante qui questionne encore et toujours sur la limite du divertissement horrifique. Si limites il existe, ce film là les frôle à coups de ciseaux dans la jugulaire, tout en restant hypnotisant. Sauvagement hypnotisant.


Réalisé par Julien Maury et Alexandre Bustillo
Avec Alysson Paradis, Béatrice Dalle, Nathalie Roussel
Film français | Durée : 1h23
Date de sortie en France : 13 Juin 2007

28 novembre 2010

Harry Potter et les Reliques de la mort - partie 1

Après une longue attente, Harry Potter et les Reliques de la mort sort enfin sur les écrans. Mais les fans ou amateurs devront retenir leur impatience encore un peu : divisé en deux parties, le septième et dernier livre de J.K Rowling se voit adapter en deux films. Stratégie commerciale ou soucis de fidélité pour l'œuvre originale ? Ce qu'il y a de bien dans Harry Potter, c'est qu'à l'image de la saga, il s'agit des deux.
Il y a bientôt dix ans, la Warner sortait la première adaptation des volets du jeune sorcier : soignée et féérique à souhait, la franchise Harry Potter a su de façon générale fidéliser une grande partie des spectateurs. S'en découle alors un franc succès populaire fait de six films à budget que le box-office est toujours venu gracier, et une véritable entreprise interne qui tourne à pleine régime dans les studios Leavesden en Angleterre. Cette saga définitivement hétérogène (quatre metteurs en scène se seront succédés) a sans doute eu cette avantage de rester éclectique, que cela soit au niveau de l'âge ciblé – si les deux premiers films s'offrent bien sûr aux enfants, les autres non – ou de l'ambition des films – tant commerciale que qualitative.
Après avoir mis en scène les deux précédents volets, David Yates reprend le flambeau. Étonnamment, ce réalisateur de téléfilms auparavant inconnu ou presque, sera celui le plus important de la saga cinématographique. A l'image du choix de l'indépendant méxicain Alfonso Cuaron pour le troisième volet, il y avait de l'audace de la part de la production. Audace positive, Yates réussissant à donner un souffle plus émotionnel à la saga, plus sombre aussi, pour finalement donner à juste titre un ton mature aux films. Ce dernier volet en est bien sûr l'apogée dans les thèmes développés : la mort, l'injustice, la vengeance, la violence amoureuse sont là plus que jamais... Alors épargnez vos enfants et surtout épargnez vous si l'histoire d'Harry Potter n'a que peu d'intérêts pour vous. La première partie des Reliques de la mort est un film fait pour les amateurs de la saga. La trame, bien trop complexe pour être accessible aux non-amateurs, se débarrasse de cette contrainte impossible, même si quelques flashbacks trouvent leur place au montage histoire de ne pas perdre tout le monde au passage. Mais le résultat est bien là : fidèle au livre, le film est fait pour les spectateurs qui aiment et connaissent l'univers avec une attention qui le démarque peut-être de tous les autres. L'ombre de Rowling n'a jamais été aussi présente. Les séquences d'action ponctuelle sont survitaminées (la poursuite dans le ciel, la séquence à Godric's Hollow très réussie, la torture dans le manoir...) pour éviter au récit très narratif – Harry, Ron et Hermione errent dans la nature à la recherche des Horcruxes et bientôt des Reliques – de plonger dans l'ennui. Tout compte fait, la division en deux films se justifie : servie une nouvelle fois d'une photographie tout simplement superbe dans des jolis décors (avec pas mal d'extérieurs ça fait du bien), la part belle est faite particulièrement à l'interprétation des acteurs. Le trio Radcliffe, Grint, Watson est définitivement bien rôdé, mention spéciale pour la jeune Emma qui campe une Hermione plus dans la retenue - la séquence d'ouverture avec elle est vraiment un bon choix – et ainsi plus émouvante.
Spectaculaire, parfois terrifiant et surtout juste, Harry Potter et les Reliques de la mort est une nouvelle fois marqué d'une sensibilité unique dans le genre des grosses productions, encore plus remarquable ici. La séquence de la danse dans la tente, spirale optimiste terriblement émouvante rajoutée au script, est à l'image de cette particularité qui démarque cette coûteuse franchise cinématographique des autres du genre. Harry Potter et les Reliques de la mort – partie 1 trouvera sans trop de problèmes sa place dans les cœurs des adeptes déjà incapables d'attendre la fin, comme dans celui d'une bonne partie de la critique. Un bon contre-exemple à cette idée stagnante de séparer la qualité du spectacle.


Réalisé par David Yates
Avec Daniel Radcliffe, Rupert Grint, Emma Watson
Film américain | Durée : 2h25
Date de sortie en France : 24 Novembre 2010

23 novembre 2010

Dossier #01 : Harry Potter au cinéma

Bientôt dix ans que le petit sorcier à lunettes est apparu pour la première fois au cinéma ! C'était en 2001 avec L'École des sorciers, succès populaire de fin d'année qui confirmera à la Warner de son bon choix d'adapter l'œuvre de J.K. Rowling, à l'époque toujours en construction mais déjà très populaire.
Depuis, six films ont vu le jour sous la réalisation hétérogène de différents metteurs en scène, mais l'œil toujours aussi constant et attentif de son producteur principal (David Heyman) et bien sûr de la maman du projet papier. Les lecteurs, les spectateurs et surtout les fans de la première heure ont désormais bien grandi... mais l'engouement autour de la première partie du dernier volet, Harry Potter et les Reliques de la mort, montre que la magie reste intacte.
A la veille de la sortie officielle du film, retour sur une saga décidement bien ensorcelée...
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Harry Potter à l'École des sorciers (2001)
Les studios Warner se donnent le pari d'adapter au cinéma le premier livre d'une saga lancée par une écrivaine anglaise, inconnue il y a encore quelques temps, mais d'ores et déjà célèbre. Son miracle ? Un enfant héros dans une aventure fantastique, qui découvre avec émerveillement le monde de la magie... avec une certaine amertume aussi. Il apprend qu'un mage noir a tué ses parents, et qu'il est lui-même la victime de sa disparition. Jusqu'alors... Car évidemment, Harry n'a aucune idée des aventures qu'il l'attendent à Poudlard, l'école des sorciers, où il devra avoir besoin de ses amis (Ron et Hermione) et de toute sa bravoure.
Premier livre étonnant, premier film envoutant. L'invitation au rêve fonctionne à merveille. Les studios mettent à bon escient un budget conséquent mais nécessaire. Chris Columbus – réalisateur de Maman j'ai raté l'avion – trouve logiquement ses marques et offre un beau spectacle soigné qui, à l'instar du roman, reflète un joli portrait de l'enfance.


Harry Potter et la Chambre des secrets (2002)
Même recette que le premier, même succès. Quoi que les ingrédients se noircissent déjà un peu... Harry a assisté au retour vaincu de Voldemort, le Mage noir, à la fin de l'année précédente. Mais cette deuxième année ne s'annonce pas de tout repos non plus. Une chambre secrète aurait été ouverte et son héritier sème le chaos dans l'école en pétrifiant les élèves... Le Seigneur des Ténèbres serait-il une nouvelle fois derrière tout ça ?
Dans son deuxième livre, Rowling prouve que le premier n'était pas un coup de bol. Son univers est déjà bien installé et les fils de l'intrigue se nouent déjà. Columbus parvient à saisir l'atmosphère plus angoissante de ce deuxième volet, tout en offrant toujours cette même qualité de spectacle. Harry Potter est bien parti pour devenir une saga cinématographique à succès.


Harry Potter et le Prisonnier d'Azkaban (2004)
Le troisième film marque le plus grand tournant dans la saga Harry Potter au cinéma. Alfonso Cuaron, réalisateur mexicain auteur d'Y tu mama tambièn, est un choix aussi audacieux qu'inattendu de la Warner. Un moyen d'utiliser à leur guise un réalisateur quasi inconnu ? Le résultat démontre le contraire. Harry et ses amis deviennent des adolescents. Là où Columbus brillait pour exploiter le thème de l'enfance, Cuaron semble saisir le changement nécessaire alors que le héros a treize ans. Photographie plus sombre, décors restitués aux allures d'une Écosse brumeuse et inquiétante, Le Prisonnier d'Azkaban pose réellement les fondations dont se serviront les prochains films. L'histoire se complexifie et tend vers une dramatisation importante (le thème de la mort, ca y est on y est) qui donne à juste titre l'intérêt de cette franchise en apparence populairement enfantine : car la vraie force des livres est à la fois l'univers magique propice à l'imagination, certes, mais aussi ces sujets abordés, profondément humains. Ce troisième film, plus grave, plus ciblé dans la véritable atmosphère de la saga, était sans doute le film à ne pas rater. Et il ne l'est pas.


Harry Potter et la Coupe de Feu (2005)
Volet pilier de la série, ce quatrième film est sans doute moins réussi que les précédents. Sans jeter la faute sur le nouveau réalisateur, Mike Newell, il y a sans doute dans ce trop plein d'action scénarisé avec des raccourcis indigestes pour les fans, cette peur de lasser un public qui commence à bien connaître Harry Potter, ses potes, ses problèmes et son école. Le livre, beaucoup plus dense, donne bien du fil à recoudre... Il y a dans cette suite, un équilibre un peu perdu, un univers un peu oublié, mais du spectacle avec un budget qui se voit à l'écran. La séquence aquatique reste dans les mémoires (des cinéphiles en général je pense) de par sa beauté et sa virtuosité technique. Également, La Coupe de Feu permet enfin de voir la véritable résurrection de Voldemort qui replonge (enfin ?) le film dans une noirceur pertinente. Ralf Fiennes se révèle parfait dans la peau glissante et ondulante du Seigneur des ténèbres. On peut aussi retenir la performance d'acteurs, le scénario osant plus dans les émotions du fait de l'expérience de Radcliffe (séquence de la mort de Cédric par exemple), Grint (potentiel comique) et Watson (scène mélodrame du bal de Noël...). Les personnages se creusent malgré le fait que cette page là est sans doute moins réussie que les précédentes. Mais sa fin (le retour de Voldemort) en tourne d'autres qui promettent déjà de nouvelles expériences.


Harry Potter et l'Ordre du Phénix (2007)
Voldemort est revenu mais personne ou presque n'ose vraiment croire Harry... ou ne sont pas prêts à croire. Subtile revirement dans le livre de Rowling qu'un nouveau réalisateur sortit tout droit des téléfilms, David Yates, est avide de mettre en scène. L'Ordre du Phénix retrouve l'esprit qu'avait perdu le volet précédent. Même si scénaristiquement le film prend de plus en plus de libertés vis à vis du roman (compréhensible vu sa densité, sans rappeler que le cinéma et la littérature sont deux écritures différentes), le tout se tient bien, mieux que le côté expédié reproché à La Coupe de Feu, et libère une certaine insolence malicieuse – Harry et ses amis se rassemblent et brisent les règles du Ministère pour vaincre Voldemort – tout en excellant dans l'émotion et le spectacle. Le paroxysme se retrouve à la fin, où après une bataille exceptionnelle et visuelle entre les deux plus grands magiciens, la séquence la plus émouvante et envoutante de la série se révèle vraiment très juste dans ce que résume toute cette histoire (l'amour, l'amitié, la pitié, l'ignorance...). Bonne réussite, qui a déjà le simple mérite de paraître fluide bien que le roman soit le plus complexe.

Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé (2009)
Le potentiel problème pour un avant dernier film est de se contenter d'annoncer le dernier. Heureusement, la matière de Rowling tente de déjouer au maximum cette fatalité par un jeu habile par découverte de qui est vraiment Voldemort, de son enfance à son échéance. Yates, rôdé, reprend le flambeau et offre un spectacle d'une qualité toute aussi satisfaisante. Moins énergique que les autres volets, sans doute plus narratif, Le Prince de Sang-Mêlé a néanmoins cette belle réussite d'évacuer un manichéisme facile en s'attachant aux raisons d'un déclin. Il est sans doute le volet le plus psychologique, car les émotions n'ont jamais été aussi dures à porter aussi bien au niveau amoureux, que dans le doute de soi (Harry, décidement très bien interprété par Daniel Radcliffe). Il y a beaucoup du troisième volet dans cette pré-fin qui noue de la même façon les fils, ici pour parvenir à la fin à un climax insurmontable pour les impatients. Et beaucoup de savoir-faire, évidemment, par une équipe et une machine qui tourne à plein régime.
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Cette machine va pourtant bientôt s'éteindre. Celle qui, malgré son côté industriel indiscutable et son goût du chiffre, a donné à cette saga une qualité certaine. De la nostalgie des premiers films et des premières lectures pour toute une génération (qui est la mienne), à l'exigence grandissante au fur et à mesure des adaptations, Harry Potter a su donner au cinéma ce qu'un grand nombre de personnes, peu importe leur âge, attendait de voir sur un grand écran : une fenêtre ouverte sur un univers, qui attend de vous tendre la main une quasi-dernière fois dès demain.

14 novembre 2010

Date Limite

Après le succès populaire et critique de Very Bad Trip – délicieusement déjanté – Todd Phillips revient derrière la caméra. Et avec un argument de choc : en tête d'affiche Robert Downey Jr. et Zach Galifianakis révélé dans le précédent film. Le récit, quant à lui, s'installe autour d'une idée scénaristique simple : faire rencontrer puis obliger deux personnages oxymores l'un à l'autre à voyager ensemble pour un roadtrip décalé.
Rapidement, le duo d'acteurs fonctionne. Les péripéties se multiplient dans une trame qui ne s'essouffle jamais au risque de laisser le spectateur sur le bas côté. Le couple improbable formé par ce gros-barbu-maniéré-enfantin-insouciant et cet homme-classe-victime-énervé-bientôt-papa offre aux scénaristes une multitude de possibilités comiques qu'ils n'hésitent pas à enchainer. Certains dialogues, parfaits, deviennent méchamment drôles dans la bouche de ce Downey Jr. et Galifianakis. Date Limite joue la comédie sur deux opposés : ces séquences « scénarisées », reposant sur des dialogues loufoques, et sur le spectaculaire décalé. Mais l'action vitaminée, plus présente que dans Very Bad Trip, donne à la longue un aspect un peu trop virile et surpopulaire. L'équilibre peine à être trouvé si bien qu'une course poursuite en caravane, bien que drôlement inattendue, lasserait presque de tant d'insistance. Autre que l'action, les gags redondants ont également ce mauvais effet de nuire un peu à la subtilité humoristique du film. Redondances par clins d'œil au bord du plagia – entre les cendres du défunt à la Beau-père et moi et la jetée funèbre très ancrée à la Big Lebowski, ou redondances « types » du trip drogue et du cocu incertain, Todd Phillips semble parfois tomber dans la facilité. Mais son film ne tombe jamais dans l'ennuie et trouve toujours un moyen de faire rire, du moins sourire. Des répliques excellentes (« Je ne suis pas comptable. Je suis même pas juif ! »), aux mises en situation à effet dramatisant (le performance d'acteur de Tremblay dans les toilettes, la baston avec l'handicapé...), Date Limite garde cette fougue, cet humour décomplexé et simple qui se fixe comme règle de croire avant tout aux personnages.
Un peu moins aboutit et délirant que Very Bad Trip, Date Limite fera pour autant passer aux spectateurs amateurs du genre de bons moments de délire made in America ; ceci tout en offrant de façon pas con du tout un zeste de réflexion sur l'apriori des uns sur les autres dans un monde moderne qui aime l'ordre... et ainsi que tout (le monde) soit rangé à sa place. Plutôt cool.


Réalisé par Todd Phillips
Avec Robert Downey Jr., Zach Galifianakis, Michelle Monaghan
Film américain | Durée : 1h35
Date de sortie en France : 10 Novembre 2010

8 novembre 2010

Paranormal Activity 2

Tremblez jeunes mortels : le deuxième volet de Paranormal Activity sort sur les écrans. Le jeu de la caméra témoin continue pour un menu tout aussi endiablé que le premier volet. Le premier film avait été reçu avec un accueil plutôt mitigé. Faute à une promotion surdimensionnée, les spectateurs avaient été généralement déçus. Pourtant, ce film a 10 dollars réalisé par un jeune réalisateur inventif, n'était pas sans intérêts. Huit-clos dans une maison, emprisonnés dans cette satanée caméra dont nous sommes esclaves, les spectateurs avaient de quoi se faire quelques frayeurs. Peur de l'inconnu, de l'impalpable, du noir mystérieux renvoyant à nos propres peurs primaires, Paranormal Activity a fait revivre des émotions profondes que l'on avait oublié depuis Le Projet Blair Witch. Le deuxième volet s'inscrit encore plus dans cette mouvance – efficace quoi que devenant usante – qui consiste à faire croire à une vérité dévoilée. Paranormal Activity 2 est le même film que le premier, en plus grand, dans une plus grande maison, avec plus de monde et de caméras.
L'idée de la caméra filmant le couple en train de dormir a fait des bébés : suite à un pillage, la famille décide de placer des caméras de surveillance un peu partout. Avec le caméscope familial, elles seront nos yeux, bien ouverts malgré le voyeurisme dont veut nous faire culpabiliser la production avec ce panneau, marrant mais toujours aussi efficace au début : « La Paramount souhaite remercier la famille des victimes ». Comme ça, on est prévenu.
Le crescendo opéré dans la terreur – démon ou pas démon ? - est sur la même lignée que le premier volet, en peut-être plus efficace. De façon générale, ce Paranormal Activity 2 ose plus dans le visuel et ainsi devient plus terrifiant. Mais attention : pour les amateurs du premier, la surprise risque d'être grandement affaiblie. La recette restant strictement la même, ce nouveau film n'ose pas d'idées nouvelles mais amplifie celles précédentes. Un repos sur des acquis. Le plus gros défaut de cette suite, finalement très paresseuse.
Reste ces scènes – toujours aussi efficaces – qui rendent flippant le banal d'une quiétude on ne peut plus calme... jusqu'à surprendre le spectateur. La séquence des tiroirs et celle de la jeune femme attrapée par les pieds demeurent d'une grande terreur. L'avantage de cette série est de s'attacher sur cette idée vraie que les choses les plus terrifiantes sont celles que l'on ne comprend pas forcément et qui ainsi nous dépassent. Le monde de l'inexpliqué reste un puits d'inspirations certain au genre de l'épouvante. Reste que cette saga, même si elle a trouvé le bon ton, s'essouffle grandement dès le deuxième volet. Espérons que cette belle matière de base sera repensée dans un potentiel troisième film... Mais ne prions pas trop vite. Ne blasphémons pas non plus.


Réalisé par Tod Williams
Avec Katie Featherston, Brian Boland, Molly Ephraim
Film américain | Durée : 1h31
Date de sortie en France : 20 Octobre 2010

1 novembre 2010

Les Petits mouchoirs

Pour son troisième long métrage derrière la caméra après Mon Idole et l'adaptation de Ne le dis à personne, Guillaume Canet signe un film plus personnel, mettant en scène ses amis acteurs bien connus. Boudé par une partie de la critique, malgré la consécration aux César pour Ne le dis à personne, l'acteur peine à se faire reconnaître en tant que metteur en scène par la presse mais amène les spectateurs dans les salles obscures de façon plus que satisfaisante. Les journalistes antipathiques dès la base n'y sont pas allés de main morte sur ce nouveau film non plus : les critiques assassines de certains magasines risquent une nouvelle fois d'aller à l'encontre d'un joli succès populaire. Cet écart fréquent est, certes, aussi surprenant qu'une guerre-guerre syndicats versus police... mais pose néanmoins de sérieuses questions, toujours.
« Sortez les mouchoirs, ils seront utiles : sur les écrans français, cette semaine, il y a une grosse tâche. ». Le site Chronic'art nous prévient, nous vilains spectateurs (trop cons) capables d'apprécier quelque chose que l'on pense être un film, mais qui n'est en fait qu'une « tâche ». A titre d'exemple... Mais alors, ces piqûres au vitriol sont-elles justifiées et justifiables ?
Ne nous faisons pas l'avocat du faux diable : Les Petits mouchoirs est loin d'être un film extraordinaire. Cependant, il est certainement aussi loin de mériter tant de regards de haut(ains). Fresque amicale à la Kasdan des Copains d'abord, Canet met en scène une bande d'amis partis en vacances. Scénario chorale, le film s'appuie alors sur les « petits mouchoirs » de ces potes, de ces mensonges faits aux autres et à soi même, leurs causes, ces indifférences et ces comportements qui ne nous amèneront pas tous au Paradis des bons, pour sûr. Si Canet parvient à un objectif, c'est bien celui d'avoir trouvé le bon ton pour faire plonger son spectateur dans une catharsis dont il ne ressortira pas. Le rythme, visiblement préoccupation première du cinéaste, trouve ses marques et ce dès un premier plan séquence absolument remarquable, variant intérieur, extérieur et valeurs de cadre dans un énorme plaisir de cinéma. Évidemment narratif, Canet opte pour une multicam quasi documentaire afin de dynamiser son récit. Avec une telle multitude de protagonistes, le scénario est d'autant plus important. Balayant ses personnages aléatoirement, parfois le film semble « flotter » mais l'évolution constante de ces derniers parvient à tuer majoritairement les longueurs à ce film de deux heures et demie tout de même.
Assez clairement, Les Petits mouchoirs permet surtout à son réalisateur de diriger des acteurs qui lui sont chers et il le fait avec une grande réussite. Ces acteurs – déjà confirmés pour la plupart – signent tous une interprétation vraiment juste donnant à l'histoire une profondeur nécessaire. Car Canet, mine de rien, malgré cette « tâche » qu'il nous inflige, dépeint un beau portrait des relations entretenues dans une époque difficilement analysable puisque nôtre. Malgré cela, à la fin (bien trop poussée...), il y a cette sensation agréable bien que pas forcément réjouissante d'avoir vu plus que des amis fictifs mais bien la représentation de sentiments et de questions qui nous hantent, inlassablement. Les Petits mouchoirs guideront de façon certaine un bon nombre de spectateurs dans un voyage imparfait mais bourré de qualités, et continuerons aussi certainement de laisser sur la touche une critique marbrée. Mais, finalement, on s'en fout.


Réalisé par Guillaume Canet
Avec François Cluzet, Marion Cotillard, Benoît Magimel
Film français | Durée : 2h35
Date de sortie en France : 20 Octobre 2010

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