24 février 2011

True Grit

Tout le monde en entend parler, mais inutile de se plaindre de tant de médiatisation : les brothers Coen n'ont pour ainsi dire jamais vraiment connu l'échec. Exemple frappant d'une réussite tant critique que populaire, les frères cinéphiles gagent toujours une certaine qualité. Revenu en force l'année dernière avec la comédie A serious man - après le plus pâlot Burn after reading -, ici c'est dans le genre du western que les Coen s'aventurent.
Sorte de Fargo en plein Ouest américain du 19ème sicèle, True Grit s'articule sur une histoire de vengeance singulière : celle d'une petite fille qui engage le marshal Cogburn (Jeff Bridges, un poil pété) pour tuer l'assassin de son père en compagnie du Texax Ranger LaBoeuf (Matt Damon, obstiné). True Grit joue pleinement la carte de la référence passionnée : genre adulé de nombreux cinéastes contemporains (Léone, Eastwood, Ford sont des inspirations récurrentes...), le western se plait à être recyclé tant il semble appartenir à un âge d'or révolu.
C'est bien ce recyclage assez prononcé qui marqué à première vue dans True Grit, où du plan grue léonien s'en ressort une unique rue à l'arrière plan embrumé ; autant dire du décor type studio à peine masqué. Si le jeu est intéressant, cette perte de réalisme dans les décors déstabilisent tout de même un peu. Heureusement, les dialogues des premières minutes à la saveur très Coen nous font un peu fermer les yeux, l'exposition présentant sans temps mort son trio de personnages. Une fois la poursuite lancée, la chasse à l'homme commence ; la séquence fantasmée de la traversée de la rivière qui fait débuter cette chasse est un peu déséquilibrée aussi entre appréciation de cinéma et incohérence (même pas mouillée la gamine !). Bref, le trio parti, no country for Tom Chaney...
True Grit a la maitrise attendue, de la direction d'acteurs à l'image, et même si le film n'offre finalement que peu de légèreté humoristique il se laisse regarder avec appréciation. Autant une chasse à l'ennemi qu'un duel entre ses deux protagonistes, les frères Coen parviennent à donner au récit un rythme assez efficace. Passé la première heure, la séquence de la cabane – peut-être la meilleure – donne le coup de fouet de mi-chemin. Dans une juxtaposition judicieuse, les deux séquences de conflit se proposent sous un double point de vue où, au dénouement, le sauveur devient le sauvé. Mais si cette technique est très attractive cinématographiquement, on aurait sans doute aimer un adversaire un peu plus sérieux que ces larbins, gauches dont l'un même est attardé... C'est drôle, mais pas tellement prenant !
Malgré ces fautes de passage, mettons dans le panier sa conclusion décalée, True Grit s'offre comme un bon plaisir de cinéma, tant moderne que référentiel, sans être, pour sûr, l'un des meilleurs films de ses cinéastes.


Réalisé par Ethan et Joel Coen
Avec Jeff Bridges, Matt Damon, Josh Brolin
Film américain | Durée : 2h05
Date de sortie en France : 23 Février 2011

19 février 2011

Jewish Connection

Une communauté juive en plein cœur de Brooklyn, et Sam jeune fils d'une famille aux traditions strictes, qui lui trouve une prétendante à un possible mariage. Vingt ans mais encore adolescent dans son inexpérience professionnelle et sexuelle – il travaille avec papa à l'atelier et regarde de sa fenêtre les pornos de son voisin Yosef – sa vie prend rapidement un tournant. Délaissé par la famille de la jeune fille qui lui était promise, il découvre en même temps par Yossef les extrêmes bénéfices du trafic de drogues. D'abord crédule, alors que Yosef parvient à lui faire croire qu'il fait passer à la frontière de simples médicaments, Sam devient bientôt happé par cette vague d'argent facile, de soirées aux filles bien réelles, de voyages à Amsterdam...
Jewish Connection nous plonge dans cette réalité assez ignorée des prémices du trafic de drogue importée d'Amterdam jusqu'à New York par de jeunes Juifs orthodoxes, pas toujours au courant de leur rôle de passeurs. Le sujet est bon, d'autant plus que le protagoniste donne un relief attachant, encore très bien interprété par Jesse Eisenberg, la révélation du précédent Social Network.
Le scénario propose une plongée empirique assez traditionnelle – du Sam innocent se révèle un jeune adulte confiant et envieux – mais a cette belle idée de ne jamais donner l'occasion au personnage de se trahir. Entré dans cet univers de façon assez vulnérable, c'est par sincérité et attirance pour la femme du boss, qu'il prend en fin de compte conscience de cette spirale infernale de laquelle il veut maintenant s'échapper.
Caméra au poing mais faible zone de netteté, pour sa première réalisation Kevin Asch opte pour une mise en scène sans cesse entre cinéma d'approche sociale et de fiction pure. Efficace, son cadre ne délaisse jamais son protagoniste permettant au spectateur une identification nécessaire. S'en ressort alors de belles séquences au ton terriblement juste, à l'image de celle du cadeau qui ne fait plaisir à personne ou ce rituel juif en pleine rue qui semble faire comprendre au personnage l'intérêt de croire en ses convictions, religieuses ou non. Le réalisateur propose une vision de la religion finalement assez peu vue au cinéma. Dénudée des critiques récurrentes, la religion est ainsi approchée comme une base de rituels au code moral primordial. Le simple fait que la fin, pourtant profondément morale, fonctionne et ne choque pas montre que Jewish Connection parvient à être à la hauteur de ses enjeux. Loin d'être un film sur la religion, ce dernier questionne plus sur notre rapport à la morale et l'importance des blessures psychologiques (ici la rupture de la famille de la jeune promise) pouvant faire tout basculer.
Malheureusement, de ce beau parcours cinématographique, on en regrette sa brièveté, son effet accéléré qui se compresse autour d'une petite heure et demie. Mais ce principal défaut est sans doute finalement le révélateur d'un bon côté : à défaut d'être passionnant, Jewish Connection paraît trop court et abrégé. Mais sans aucun doute cette fois, il signe le talent certain d'un metteur en scène inspiré.


Réalisé par Kevin Asch
Avec Jesse Eisenberg, Justin Bartha, Ari Graynor
Film américain | Durée : 1h29
Date de sortie en France : 16 Février 2011

Je suis un no man's land

Après un premier long-métrage, Les Invisibles, Thierry Jousse, ex rédacteur en chef des Cahiers du cinéma, signe un deuxième film en compagnie du chanteur Philippe Katerine, déjà figurant dans d'autres projets précédents du cinéaste.
Le récit est celui de ce personnage que l'on connait déjà, ce chanteur un poil déjanté, qui suite au concours d'évènements bizarres retrouve ses parents délaissés depuis l'adolescence et trouve l'amour de sa vie au gré de promenades nocturnes en forêt... Autant le dire : si vous ne parvenez pas à adhérer à la personnalité du chanteur, fuyez ! Bien que Je suis un no man's land ne se propose pas comme un documentaire sur Philippe Katerine, son personnage est une sorte de double de fiction. La première séquence du film coupe net le chanteur lors de son arrivée sur scène : Jousse prévient ainsi son spectateur qu'il ne sera pas question du chanteur, mais bien d'une réelle plongée dans la vie singulière de ce personnage qui nous est déjà un peu familier.
Je suis un no man's land est une bonne surprise. Désavantagé par son accueil mitigé dans la presse, boudé par les spectateurs, pourtant le film de Thierry Jousse est empreint d'une douce folie assez communicatrice. Il y ressort une belle envie de création, ou de re-création d'un monde déjà existant, prise en main par ce protagoniste loufoque mais tendrement attachant. Déluré, le scénario ne perd pas l'atmosphère qu'il parvient à instaurer dans une première partie de jeu, hilarante, qui confronte l'artiste à une fan psychologiquement atteinte. Sans tomber dans le piège d'une comédie musicale facile, c'est plus la forme d'un conte qu'adopte le réalisateur. A travers ses références populaires (le costume type magicien d'Oz, la forêt, la route infernale qui empêche de repartir, les clichés de campagne...) et l'envergure sentimentale (relation parents / fils), Jousse propose un film ovni, sorte de no film's land, qui séduit en parvenant à nous convaincre de l'incroyable. A l'image de la scène de la chanson nostalgique, unique travelling qui se conclue sur l'être perdu, le réalisateur propose une palette d'émotions dont la force est de rester sans cesse instable.
Cependant, presqu'à l'évidence, Je suis no man's land faute quelques fois, notamment sur sa photographie assez criarde, que le numérique ne parvient pas à avantager. Les quelques séquences de nuit sont les plus réussies – le duo Katerine / Depardieu fonctionne parfaitement - et reposent les yeux dans de belles teintes sombres au dominantes vertes. Le personnage de l'ami d'enfance peine lui aussi à trouver sa place, seul personnage véritablement terre à terre, décentré de cette sphère onirique dans laquelle semble être confiné tous les autres. Techniquement inégal mais joliment unique, Je suis un no man's land propose l'immersion sans être un dénonciateur de cinéma hermétiquement décalé. Simple, peut-être un peu trop, ce film donne malgré tout l'envie d'être défendu. C'est sans doute le mieux que l'on pouvait en attendre.


Réalisé par Thierry Jousse
Avec Philippe Katerine, Julie Depardieu, Aurore Clément
Film français | Durée : 1h32
Date de sortie en France : 26 Janvier 2011

13 février 2011

Carancho

Petit à petit le cinéma argentin trace sa route et se révèle. La récompense aux Oscars pour Dans ses yeux de Juan José Campanella est ainsi venue d'elle même, comme une reconnaissance. Pablo Trapero a lui aussi connu la nomination. Sixième long-métrage, Carancho se propose comme un thriller social, au romantisme pour autant prononcé.
Un carancho est un avocat spécialisé dans les accidents de la circulation à Buenos Aires, un « rapace » qui fraude les assurances avec l'aide des victimes et de policiers mafieux. Sosa, brut, physique, mais aux yeux d'un bleu tendre, en est un. Alors qu'il supervise la simulation d'un accident, il rencontre Luján, une jeune urgentiste. Belle, un peu amochée, droguée pour tenir, il tombe sous le charme.
Trapero soigne son film, lui donne une préciosité saisissante. Très vite, il fait comprendre au spectateur qu'il parle d'amour, et au spectateur de comprendre que cette toile sociale de fond sonne déjà comme une alarme. Au début de cette relation entre ces deux êtres, le désir né à l'image avec un naturel sensible : d'un cadre décentré, déjà bancal, Sosa brûle d'envie pour Luján qui s'endort lessivée. La mise en scène varie sans cesse entre cinéma de transparence (plans fixes, légers travellings, fragmentation du cadre) et documentaire (caméra au poing, plans séquences). Lorsque Luján comprend en intervention qui est vraiment l'homme dont elle tombe amoureuse, cette rupture très nette vient donner à Carancho toute son intensité.
Filmé en caméra RED, le numérique donne une certaine dureté à l'image et du réalisme dans les images urbaines de nuit. Le réalisateur nous plonge avec réussite dans l'univers de ce couple voué dès sa naissance à la survie. Il y a à travers ce cinéma vérité un vrai témoignage saisissant qui, presque sans effort, parvient à illustrer un malaise social avec ses protagonistes pris au piège. Jamais dans le témoignage pur, Carancho est au final une vraie romance baignée de tragédie œdipienne. Les acteurs, très bons, de la découverte pudique au sacrifice amoureux, apportent l'émotion nécessaire.
Cependant, le film bascule dans son climax vers un thriller assez poussif, un survival peut-être trop souligné qui perd la rigueur du fil narratif. Heureusement, le réalisateur ironise un tant soit peu son dénouement à travers un plan séquence final efficace qui agit finalement comme un pur plaisir de cinéma. Touchant, bien que parfois trop écorché, Carancho se laisse facilement apprécié. Noyau sensible dans une enveloppe sociale corrompue, le film de Trapero parle beaucoup de lui-même, sans trop en dire. Une jolie réussite.


Réalisé par Pablo Trapero
Avec Ricardo Darin, Martina Gusman, Carlos Weber
Film argentin | Durée : 1h46
Date de sortie en France : 02 Février 2011

Tron l'héritage

Le nouveau blockbuster de Disney a mis les moyens techniques : Tron l'héritage, remake du film culte des geeks des 80's, propose un univers totalement virtuel en IMAX 3D.
Pour commencer par les banalités, le film est techniquement quasi irréprochable : de son premier plan renversant, aux courses de moto déjantées au montage enivrant, Tron fait vriller la rétine et les tympans. Le film gronde de puissance de la nouvelle technologie de projection. La 3D est efficace, et a cet atout d'imprégner le film de l'univers raconté (la 3D arrive lors de l'arrivée dans le monde virtuel). Bref, le spectacle promis est là.
A côté de cet objectif réussi, le problème c'est... qu'il n'y a rien de plus. Tron l'héritage suffira l'adrénaline des jeunes d'aujourd'hui, mais laissera certainement les nostalgiques d'hier sur la touche. Là où le premier film annonçait les progrès techniques s'en faisant le visionnaire joliment passé, Tron surcharge, missile sans âme, à l'image finalement d'une époque où la technologie est devenue une évidence. Le film se fait donc bien le portrait d'une génération sans cesse dans la mouvance et l'excès... pour enfin proposer l'adaptation d'un film en produit de marketing codé de toute pièce.
Le récit commence plutôt bien, rythmé efficacement jusqu'à la plongée dans la « grille » - monde numérique parallèle au notre - narrant la situation initiale sans trop de lourdeurs, que l'on connait indigestes dans d'autres films de ce genre. Mais une fois le paquet emballé (une scène de combat et une course endiablée), le scénario faiblit et cale. L'histoire peine à prendre de l'intérêt et des longueurs se font ressentir au bout d'une heure. Véritable argument de vente, la musique électro des Daft Punk dynamise une seule fois l'action (pas terrible, dans la boîte de nuit) que le caméo des deux versaillais rend toutefois un peu sympathique. Mais le groupe s'illustre surtout dans une musique harmonique d'accompagnement, pas mauvaise mais qui n'a rien d'exceptionnelle.
De façon prévisible, le film s'attache au point de vue d'un jeune homme (Transformers, Jumper, Percy Jackson... la règle lasse), et reste pudique question attaches sentimentales. On aurait peut-être aimé un peu plus d'hormones car le coucher du soleil les mecs, c'est un peu démodé.
Finalement, vaut mieux retenir de ce Tron son énergie à fait court-circuiter le cerveau et ses images numériques aux couleurs froides lumineuses, et faire l'impasse sur le calme plat à sa surface. Assez difficile, tout de même.


Réalisé par Joseph Kosinski
Avec Jeff Bridges, Garrett Hedlund, Olivia Wilde
Film américain | Durée : 2h06
Date de sortie en France : 09 Février 2011

12 février 2011

Angèle et Tony

Angèle est belle, son prénom angélique, mais elle se vend dans un endroit désaffecté... pour offrir un jouet à son petit garçon, confié à ses grands-parents depuis qu'elle a purgé une peine de prison liée à la perte du père. Son but (retrouver la garde son enfant) en croise un autre moins glorieux (vendre son corps dans cette campagne de Normandie via des petites annonces). Bref, Angèle est cette princesse déchue, très encrée à la Dardenne, interprétée au couteau par une Clotilde Hesme toute en raideur et simulations. Puis elle fait la rencontre de Tony, un pêcheur au cœur gros, un peu seul chez bonne maman.
Angèle et Tony est une belle poésie qui prend le temps de s'installer, soigne ses cadres et laisse parler le silence. Sorte de Belle et la Bête inversé, le film touche parfois de belles sensations, notamment lorsqu'Angèle se retrouve seule, isolée par des longues focales comme sur cette route difficile à franchir, un pneu crevé. Ou lorsque le conte enfantin (ici Blanche-Neige) prend une dimension sexuellement adulte, le désir déchirant l'épiderme des deux amants malgré eux. Alix Delaporte signe donc un premier long métrage maitrisé et sincère, et trouve l'épaisseur nécessaire à travers ses multiples économies, quelles soient dans les mots, l'action ou le nombre de personnages. Quelques faiblesses, notamment dans la direction d'acteurs, participeraient même au charme des premières fois, l'approche parfois bancale de son sujet lui donnant une certaine vibration.
Cependant, il faut avouer qu'Angèle et Tony traine derrière lui une série de films hexagonaux du même ressort... Et sur ce point, celui-ci peine à s'affirmer. Pudique, le scénario ne cherche jamais la provocation ou si peu, malgré ce thème de la réinsertion. En témoigne une séquence assez étonnante où Angèle coupe court la juge pour la garde de son enfant, en baissant les bras avec le sourire. A défaut de proposer beaucoup de tendresse, Delaporte surcharge peut-être son film de crème à l'image de la musique bien (trop) présente qui dans ses notes de guitare ou de piano veut amplifier de l'émotion déjà présente. Le personnage de Clotilde Hesme semble parfois pâtir de cette stagnation dans le tendre, si bien que l'identification ne devient jamais évidente, et pourtant semble être voulue.
Touchant tout de même, Angèle et Tony est un bon premier film aéré qui semble pour autant tenir trop à ces ancêtres en proposant au final un cinéma français qui lasse à défaut d'être compris. Mais qui s'est s'apprécier à l'avantage d'être encore un peu parlant.


Réalisé par Alix Delaporte
Avec Clotilde Hesme, Grégory Gadebois, Evelyne Didi
Film français | Durée : 1h27
Date de sortie en France : 26 Janvier 2011

La BM du Seigneur

Titre énigmatique qui rend monstrueusement anachronique l'œuvre d'Albert Cohen, affiche photoshopée à l'arrache montrant flingues, chien féroce et voiture puissante... C'est quoi La BM du Seigneur ? Un vrai film (oui, oui), un docu-fiction au cœur de la communauté Yéniches. Jean-Charles Hue, issu de la famille Dorkel en question, a posé sa caméra dans les terrains vagues occupés tantôt dans une approche documentaire tantôt pour filmer les plans fiction. Véritable coopération entre le réalisateur et Fredéric Dorkel, le protagoniste du projet, La BM du Seigneur donne au final l'effet d'une fiction incorporée de plans documentaires que le montage rend narratifs.
Ainsi, Jean-Charles Hue propose un métrage assez singulier dont le premier atout est d'installer une communication entre deux mondes qui se croisent et se jugent mutuellement. La principale préoccupation du réalisateur semble bien de montrer ces « gens du voyage » tels qui le sont. Loin des préjugés des « sédentaires », Hue capte à travers son récit familial l'essence même de la vie des Yéniches : dévoilant une véritable micro société auto gérée, La BM du Seigneur touche dans ses séquences muettes où un combat de règlements de compte apparaît finalement aussi juste qu'un procès, et où des enfants qui jouent dans un champ ont cette merveilleuse liberté de se salir. Le film ne prône rien, il révèle. Le réalisateur semble avoir trouvé le bon équilibre entre la fiction et la vérité dévoilée, l'un servant à l'autre.
Souvent proche de son protagoniste, cadrage serré, Jean-Charles Hue parvient avec son cinéma à chercher l'identification là où – ne masquons rien – les médias créent le fossé. Il respire ainsi de cette BM du Seigneur une sincérité instructive, au-delà d'être simplement touchante.
Ainsi, l'honorabilité du projet semble égaler sa réussite, si ce n'est que cette forme très nouvelle peut parfois poser problème. Le scénario, finalement très farfelu (une vision du ciel apparaît à Frédéric, provoquant un déclenchement vertueux en lui...) peine à vraiment convaincre, du même fait de certaines séquences que le jeu rend parfois insaisissables. Néanmoins il y a dans ce film ovni une envie de cinéma et de vérité, un besoin d'imager son milieu à la Rouquier. En témoigne ces derniers plans, très beaux, qui tendent à faire lever la tête de tout le monde dans ce paradoxe universel : regardons-nous, on a beau être différents, nous sommes les mêmes.


Réalisé par Jean-Charles Hue
Avec Frédéric Dorkel
Film français | Durée : 1h24
Date de sortie en France : 26 Janvier 2011

9 février 2011

Dossier #02 : Morse : l'amour et ses contraires

En 2008, un film suédois sortit de nul part créait la surprise dans nombre de festivals. Pourtant Morse était un objet de convoitise depuis quelques temps déjà dans l'esprit de plusieurs producteurs de cinéma. Peu après la sortie du roman de John Ajvide Lindqvist, le cinéma s'est rapidement intéressé à cette écriture "cinématographique" et à ce récit propice à une interprétation visuelle. D'abord surpris (l'auteur avait eu du mal à éditer son livre) puis prudent (plusieurs propositions ont été refusées), Lindqvist et son éditeur se sont enfin vus acceptés l'offre du producteur suédois Carl Molinder. Lindqvist lui-même au scénario, Tomas Alfredson à la réalisation : le résultat est un film hypnotisant, l'un des plus intéressants du genre depuis longtemps.
Retour sur Morse, un film fantastique qui va bien au-délà, un vrai film d'amour qui semble jouer sur les oppositions du genre.

Morse, l'amour et ses contraires

Pudeur(s)

Le récit se concentre sur la rencontre entre ses deux jeunes protagonistes. L'arrivée d'Eli dans cette banlieue enneigée et glaciale de Stockholm est l'élément déclencheur ; des meurtres à répétition dans un premier temps mais surtout du bouleversement affectif d'Oskar, jeune garçon martyrisé par des camarades de son école.
Cette union est celle de deux personnages imperméables. Oskar, réservé et sans confiance, Eli, vampire diabolique pour autrui. C'est leurs faiblesses qui les réunissent. Et tout d'abord leur solitude.

Tomas Alfredson utilise la valeur de cadre pour simuler le rapprochement. Ce photogramme est la première image des deux enfants ensemble, lors du premier regard. Un panoramique compensé d'un léger travelling passe d'un Oskar seul et désespéré à ce cadre large comprenant à sa droite Eli, debout sur un jeu pour enfant. Ce plan renseigne déjà sur la future relation des enfants : Eli, dominante, sera une véritable prise de conscience et de confiance pour Oskar. Mais elle apprendra également à s'assumer en tant que contaminée... pour finalement retrouver les pieds à terre (elle saute du manège juste après).
Eli et Oskar, d'abord distants par un réflexe mutuel de leur part, feront progressivement tomber le voile de leur mégarde et leur pudeur. En s'ouvrant à l'autre, ils se rapprochent dans le cadre. Alfredson varie ainsi progressivement son cadre à la seconde rencontre.

Le Rubik's cube sera l'intermédiaire de leur attirance. Lorsqu'Oskar décide de lui prêter, le réalisateur rompt l'isolement de ses personnages dans le cadre. Contact indirect, l'insert de leur main se touchant presque est le début d'une nouvelle étape, et d'une nouvelle forme esthétique.
Le toucher est le sens le plus précieux d'Eli et Oskar. Oskar n'en a qu'une perception de violence à travers les coups de ses camarades, Eli une perception de besoin organique assassin. Les enfants redécouvrent finalement la douceur de ce sens, mais toujours dans un rapport asexué (ce n'est pas un hasard si les deux enfants sont à l'aube de la pré-puberté). Ainsi, leur découverte n'apparaissent jamais dans un désir intéressé mais simplement dans une attirance sensible. La séquence du lit (deuxième photogramme) n'en ressort que plus douce et sensuelle.
Eli et Oskar ont passé ici l'étape de la pudeur. Leur carapace s'est envolée, ils sont tous les deux dans le même lit, dans le même cadre, à s'effleurer.

Mais une fois cette pudeur épidermique arrachée, leur isolement jadis habituel devient un poison. Dans cette séquence magnifique de début et de pré-fin, sans Eli, Oskar n'est plus qu'un reflet fantôme dans la nuit, sans repères car sans toucher (la buée s'efface peu à peu).
Ce qui leur était interdit et devenu ce dont ils ne peuvent plus se passer. Eli le pilier psychologique, Oskar le sang innocent.

Une pudeur intime et organique qui se détache, peu à peu.

Morse est un film qui assume pleinement son romantisme aigu.
La violence est ainsi elle aussi soumise à une pudeur de mise en scène, qui préfère l'éloigner. Alfredson ne souhaite pas tomber dans les figures du genre : ainsi il offre des séquences d'angoisse intrigantes car toujours éloignées.

Dans ces deux attaques, le procédé est sensiblement identique. En cadrage large mais avec une proximité sonore, le réalisateur éloigne son spectateur de l'agression et lui fait fermer les yeux, à gauche par la pénombre du pont, à droite par le hors-champ.
La violence n'est pas le sujet du film, elle est une évidence connue du spectateur. Alfredson préfère alors la suggestion, l'appel à l'imagination dans une mise en scène très distante.

Ces deux plans obéissent aussi à ces mêmes règles. La porte fermée par Oskar, est filmée en travelling arrière. Physiquement, la caméra s'éloigne de l'agression du vampire. Dans le second exemple, le cadre ne quitte pas le point de vue d'Oskar. Le carnage qui se passe à la surface n'est alors suggérée que par un son étouffé et des morceaux de corps tombant dans l'eau. Ici, cet espace sous marin est une protection pour Oskar. L'enfant ne préfère pas voir ce dont est capable Eli. Cette façon de rester toujours distant est ainsi une façon de rester toujours dans l'esprit de l'enfant.

De l'impossible au refus


Le mythe du vampire a finalement cet intérêt plutôt commun d'être une barrière aux intentions du cœur. Mais Morse semble avoir ce soucis singulier de fragmenter ses protagonistes en illustrant à plusieurs reprises cette frontière, et ainsi en la matérialisant.

Voisins, les deux enfants ne sont séparés que d'un mur, une cloison shakespearienne. Pour communiquer, Oskar et Eli apprennent le morse (d'où l'adaptation française du titre). Malgré cette trouvaille, ce mur est bien la démonstration visuelle de l'apparente impossibilité de leur relation. Dans ce plan à longue focale, le mur prend la moitié du cadre, entassant Oskar vers la gauche. Le flou de mise au point crée un vide qui semble prendre la place d'une Eli absente.

Alfredson utilise sans concession la métaphore visuelle dans la séquence de la porte. Osée, la mise en scène repose sur un champ contre champ qui fait correspondre des personnages isolés par une cloison transparente. Eli devient prisonnière, Oskar visiteur. Dans cette même volonté de protection, la vampire se sépare physiquement d'Oskar. Les tracés sur la vitre divisent leur tête et semblent les diviser tout entier.

Cette porte, cette cloison, la vitre de la piscine... représentent la même chose. Lors de la séquence où Oskar se coupe la main, cette représentation prend une dimension réelle et rompt l'union des personnages. Brisée, la vitre les rend alors vulnérables :

Une fois sans protection, les deux enfants sont obligés de s'enfuir et se fuir.

Eli et Oskar sont les deux protagonistes du film. L'un n'est pas plus important que l'autre. A défaut de ne pas y avoir de personnage principal, les deux enfants sont peut-être eux-mêmes cet unique personnage. Car malgré le poison, les deux sont complémentaires ce qui les obligent émotionnellement à passer outre la malédiction. Visuellement, le réalisateur cherche la complémentarité des corps par des cadrages et un montage qui se répondent sans cesse.

Cette complémentarité est notamment recherchée dans de sublimes champ contre champ aux angles de prise de vue très travaillés.
Dans ces deux exemples ci-dessus, le montage a une fonction de déconstruction. Pour chacun de ces deux champ contre champ, de la paire d'images ne pourrait en résulter qu'une seule. Dans le premier axe, les acteurs sont quasiment de profil avec un léger décalage. Filmé très serrés, chacun prenant un côté du cadre (souvent la gauche pour Eli, signe du mal), les deux plans peuvent être rassemblés horizontalement pour crée une image panoramique.
Dans le second axe, le principe est le même avec une complémentarité verticale. Le plan sur Eli, toujours au dessus, correspond presque à l'amorce de l'épaule d'Oskar : rassemblées l'une par dessus l'autre, les deux images n'en forment qu'une seule aussi.

Ainsi, plus que de rassembler dans un premier temps les personnages, la forme esthétique du film les fait littéralement "fusionner" dans un second.
De leur fragilité commune se développe pour chacun une évolution individuelle.

A gauche, Oskar apprend à se défendre et à s'imposer. Le film bascule alors dans cette fameuse violence méritée qui questionne le spectateur tout en lui faisant du bien. Ce plan large, le plus brutal du film, est aussi un coup portée sur la morale du spectateur.
A droite, Eli évolue à sa manière. Elle se dénude pour aller rejoindre Oskar. Ces vêtements laissés à terre auxquels s'attache particulièrement le réalisateur, représentent l'acceptation de ses sentiments, et la mise à terre de ses protections internes.

Oskar et Eli se sont autant trouvés qu'ils se sont élus. Le titre original du film insinue cette idée, Let the right one in. The right one, c'est évidemment Oskar, l'être pur qui vient contaminer le sang abjecte de son élu.
Eli apprend à Oskar à dire non à ses tortionnaires. Oskar apprend à Eli à dire oui à sa propre attirance naturelle. Ce choix de refus des convenances est l'aboutissement de cette rencontre hors du commun.

Mort et souffrance

"Si je pars, je vis. Si je reste, je meurs."
Emprunté au vers de Roméo dans l'œuvre de Shakespeare, ce premier message écrit d'Eli à Oskar donne le ton dès leur rapprochement intime.
Finalement, Morse emprunte les mêmes thèmes coïncidant l'amour à la mort que l'on retrouve dans Roméo et Juliette. L'intrigue s'y prête logiquement.
Ici, Éros et Thanatos se rejoignent dans des séquences où le sacrifice individuel semble être la marque d'une affection commune.

Le premier sacrifice d'Eli est le bonbon que lui propose Oskar. Ne pouvant en manger, elle se force tant bien que mal. Le sacrifice d'Oskar, lui, est son sang qu'il fait couler en se coupant la paume. Chacun d'eux s'affaiblissent pour enfin se rassembler (dernier photogramme).
Le sacrifice et la mort font partie intégrante de leur union. Leur amour les pousse implacablement à la mort.

Le sacrifice se retrouve aussi chez la femme contaminée, qui préfère se tuer à la lumière plutôt que de rester dans le noir le monstre qu'elle est devenue.

La mort fait place aussi à l'éternel, au recommencement sans fin que semble insinuer la fin avec ces flocons de neige, magnifiques, qui ne cesse de tomber comme ne cesse de vivre un vampire.


Les paysages enneigés de Suède cristallise et conservent les corps intactes, à l'image du plan de la tronçonneuse dans l'eau qui vient déterrer un cadavre de sa couche de glace.
Eli et Oskar semble eux aussi momifiés dans ce décor, et dans ce film qui les rend éternels. La fin du train ouvre différentes interprétations possibles mais semblent néanmoins les entrainer interminablement vers un chemin sans limite.

Un voyage sans fin.

Morse refuse à la fois les facilités du genre et celles du romantisme choisi. Véritable ovni dans un paysage cinématographique pourtant très varié, le film oscille entre conte horrifique et véritable exercice esthétique. Pour en conclure sur un conseil : prenez-vous au jeu, et vous vous en souviendrez encore longtemps ! ;)


Réalisé par Tomas Alfredson
Avec Kare Hedebrant, Lina Leandersson, Per Ragnar
Film suédois | Durée : 1h54
Date de sortie en France : 04 Février 2009

2 février 2011

Le Discours d'un roi

Grand favori aux Oscars, autant dire que l'arrivée du Discours d'un roi sur les toiles ne s'est pas fait discrète. Il est toujours bon de goûter le menu avant les récompenses. Ici, on pourra certainement les imaginer gratifiantes : Tom Hooper, populairement méconnu, surtout réalisateur au petit écran, signe un portrait original de George VI. Comme promis, le film étonne, surprend et finalement séduit.
Le scénario suit l'ascension de ce prochain roi qui, de la mort de son père à l'abdication de son frère ainé, peine à assumer le rôle suprême qui lui incombe en ce début de seconde guerre mondiale. En fait, le principal problème est son bégaiement...
Entrée directement dans le cœur même du sujet, Le Discours d'un roi a cette belle qualité de ne pas en dévier. Le scénario de David Seidler est d'une grande intelligence : sans faute, il trouve dès le début un équilibre entre légèreté et dimension dramatique. Hooper s'évertue à donner à sa mise en scène une élégance prononcée. Décors somptueux, beaucoup de plans serrés et à longues focales, le réalisateur lisse son sujet implacablement. Mais finalement, il n'étonne pas de ce côté. La forme épurée trouve en vérité son relief à travers ses personnages, merveilleusement interprétés par tous. Hooper sait filmer ses acteurs. Il sait surtout merveilleusement bien les diriger. La rencontre qui unie Colin Firth (décidément en pleine ascension depuis le film de Tom Ford) et Geoffrey Rush (parfait) détient en grande majorité la réussite de ce film. Sous cette mise en scène presque lassante de propreté, leurs séquences offrent ce brin de poésie, de folie et même d'absurdité que l'on attendait du Discours d'un roi. Loin des clichés du film mondain, le réalisateur rend intime cet univers de luxure et de privilèges en révélant magnifiquement l'homme derrière l'uniforme et les médias. Sans jamais rentrer dans la démesure comme Sofia Coppola avec Marie-Antoinette, il parvient tout de même à renverser encore plus efficacement cette balance qui, trop lourde, rend au combien ennuyeux les films historiques à dimensions... historiques.
Le Discours d'un roi est un vrai portrait de cinéma, celle d'une amitié passée mais finalement encore présente, tant dans les parenthèses méconnues de l'Histoire que dans son universalité désormais proposée. Car finalement ça marche, et sacrément bien. Malgré une forme peut-être parfois maniérée, parfois peut-être trop « oscarienne », Tom Hooper parvient à dépoussiérer le film historique que l'on avait jamais sentit aussi sensible et proche de nous. Et propose surtout une merveilleuse performance d'acteurs qui – cette fois sans aucun doute – équilibre le film dans sa justesse.


Réalisé par Tom Hooper
Avec Colin Firth, Helena Bonham Carter, Derek Jacobi
Film anglais, américain, australien | Durée : 1h58
Date de sortie en France : 02 Février 2011

Incendies

Il y a des films qui vous transportent, d'autres qui vous y contraignent. Incendies fait partie du panthéon des briseurs d'âme, des arracheurs de cœur jusqu'au flamboiement posthume.
Adapté de la pièce de théâtre écrite par Wajdi Mouawad, il en ressort ces titres proches d'un découpage en actes, et certainement cette force innée à l'écriture (l'œuvre a été unanimement acclamée). Sans simplicité conceptuelle ou dialogues expressifs, Denis Villeneuve – quatrième long métrage – fait en vérité un vrai travail d'adaptation cinématographique. Dès l'exposition, avec un long travelling arrière de l'extérieur à l'intérieur, Villeneuve nous plonge dans une non-situation spatiale. Si la chronologie est précise, jamais Incendies ne propose au spectateur de réels repères de lieu. Déjà, cette première séquence type clip, magnifiée d'un regard caméra percutant, nous tend vers l'universel. Jamais Incendies ne perd également cette dimension : dans une déconstruction mêlant passé et présent narratif, le film est une quête identitaire, étrangement apolitique, qui a pour ambition ciblée de faire parler le cœur plutôt que la réflexion.
Deux jumeaux, Jeanne et Simon reçoivent à la mort de leur mère son testament, qui a pour particularité de leur confier tous deux une mission : trouver leur père et leur frère et leur remettre une lettre. Simon, d'abord lassé et en colère, laisse partir seule sa sœur au Moyen-Orient, terre de leurs origines, afin de chercher l'inconnue vérité. Villeneuve propose un récit complexe, sans cesse en montage parallèle. Cette bascule incessante du passé au présent parvient dans une première partie à ne faire qu'un entre cette mère défunte et cette fille dont l'âge est similaire. Faut-il vraiment chercher à tout savoir, même quand cela touche notre propre sang ? « Tu sais déjà que tu dois y aller, sinon tu n'arrêteras jamais d'y penser... » dixit le collègue de Jeanne, maintenant déterminée. Dans des décors brulants à la photographie chaude et aux espaces immenses et silencieux, règnent sensiblement les fantômes de la guerre passée dans laquelle se replonge Jeanne. En rouvrant des plaies douloureusement cicatrisées, elle découvre en même temps que le spectateur cette grande femme, sa mère, la plus terrible et dangereuse combattante car guidée par l'amour. Puis avec le frère, maintenant rejoint, les lettres prennent bientôt leur sens effroyable et cruel.
Incendies c'est l'histoire d'une piscine vide qu'on a besoin de remplir (magnifique travelling avant sur Jeanne lors du départ), le besoin organique de comprendre pourquoi son cœur bat aujourd'hui. Alors même si quelques séquences peinent à trouver le bon rythme dans ce film de deux heures, les acteurs, parfaits, éblouissent bien assez le spectateur pour qu'il n'y pense plus. Incendies c'est poignant, terrible et exigeant. Mais surtout imposant d'humanité, malgré tout.


Réalisé par Denis Villeneuve
Avec Rémy Girard, Lubna Azabal, Mélissa Désormeaux-Poulin
Film canadien | Durée : 2h03
Date de sortie en France : 12 Janvier 2011

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