Une chose est sûre : le Clint Eastwood de cette année ne sera pas fidèle à nos mémoires comme l'ont pu l'être – et surtout continuent de l'être – certains autres de ses films. La bande-annonce virevoltante et étonnante avait pourtant de quoi charmer. Alors même si le film profite d'un succès confortable, il semble plus tenir de sa belle promotion que du bouche à oreille (beaucoup de spectateurs dans la salle, visiblement peu de satisfaits à la sortie). Clint Eastwood avait malgré cela le potentiel d'émouvoir et de briller une nouvelle fois dans ce chassé croisé de personnages, qui touchés par la mort chacun à leur manière, finissent par rentrer en contact. Du haut de ses impressionnantes quatre-vingt années, on aurait aimé voir les faiblesses sensibles d'un grand cinéaste qui finira - on le sait - une caméra à la main. Malheureusement, on ne peut qu'y voir des faiblesses formelles qui empêchent l'immersion.
Replongée dans le tsunami de 2004, la première séquence introduit de façon efficace et impressionnante le spectateur dans la temporalité du film (approche réaliste comme pour l'attentat de Londres un peu plus tard) et dans son sujet. Marie, une journaliste française, survie miraculeusement. Puis vient George, un ancien médium américain au don extraordinaire qui rappelle à son frère qu'il ne veut plus exercer tant il souffre de sa faculté. Enfin, Marcus, un jeune enfant britannique, subit la perte de son frère jumeau, comme si la situation avec sa mère droguée ne suffisait pas. Une fois le portrait tiré, le film commence... mais ne se lance jamais vraiment. Tout d'abord, la plus grande maladresse du scénario est sa partie française, avec Cécile de France. Même si l'actrice y met de sa plus bonne volonté, le personnage ne trouve pas sa place et n'intéresse que très peu. Dans sa manière de la rompre d'une vie auréolée de succès où sa tête est quand même partout sur les affiches de Paris, Eastwood se plante et peine à rendre crédible cette part du récit. La maladresse atteint son sommet lors d'un repas de rupture où Marie déballe dans une tirade insupportable tout ce que le spectateur avait déjà compris, où lors de la mort d'une patiente à l'hôpital coupée court par un médecin à la réplique inopinée. Bref, avec ce scénario, bancale, le réalisateur ne semble pas y mettre beaucoup de cœur. Cependant, pour le jeune Marcus et le médium George, le problème n'est ni dans la crédibilité ni dans le déséquilibre. D'abord leurs interprètes sont très bons - Matt Damon est somptueux une nouvelle fois - mais le film aurait du peut-être ne s'attacher que sur eux. Malheureusement, les personnages peinent à prendre une réelle épaisseur tant la forme du film, d'une durée déjà conséquente, ne peut le leur permettre. Ainsi, les relations entre Marcus et sa mère, ou entre Matt Damon avec son frère ou, pire, avec Bryce Dallas Howard dégagée après trois scènes, n'émeuvent pratiquement jamais. Il y a tout de même quelques touches de grâce qui semblent flotter ici et là, un peu comme ces images latentes de l'au-delà, mais surtout cette rencontre entre les deux protagonistes, enfin percutante au bout de deux heures.
Eastwood ne perdra pas tout le monde sur le bas-côté, ne serait-ce que dans sa façon de filmer Damon, souvent en cadrage serré, avec toujours beaucoup de respect et d'humilité de metteur en scène. Pour le reste, autant dire qu'il ne convainc malheureusement pas, même dans sa photographie aux nuances pauvres. Comme quoi, le cinéma c'est un peu comme au jeu : parfois on gagne, parfois on perd. Alors si Clint Eastwood essuie ici un échec considérable, soyons humbles à notre tour et pardonnons le lui déjà.
Réalisé par Clint Eastwood
Avec Matt Damon, Cécile de France, Thierry Neuvic
Film américain | Durée : 2h08
Date de sortie en France : 19 Janvier 2011
Replongée dans le tsunami de 2004, la première séquence introduit de façon efficace et impressionnante le spectateur dans la temporalité du film (approche réaliste comme pour l'attentat de Londres un peu plus tard) et dans son sujet. Marie, une journaliste française, survie miraculeusement. Puis vient George, un ancien médium américain au don extraordinaire qui rappelle à son frère qu'il ne veut plus exercer tant il souffre de sa faculté. Enfin, Marcus, un jeune enfant britannique, subit la perte de son frère jumeau, comme si la situation avec sa mère droguée ne suffisait pas. Une fois le portrait tiré, le film commence... mais ne se lance jamais vraiment. Tout d'abord, la plus grande maladresse du scénario est sa partie française, avec Cécile de France. Même si l'actrice y met de sa plus bonne volonté, le personnage ne trouve pas sa place et n'intéresse que très peu. Dans sa manière de la rompre d'une vie auréolée de succès où sa tête est quand même partout sur les affiches de Paris, Eastwood se plante et peine à rendre crédible cette part du récit. La maladresse atteint son sommet lors d'un repas de rupture où Marie déballe dans une tirade insupportable tout ce que le spectateur avait déjà compris, où lors de la mort d'une patiente à l'hôpital coupée court par un médecin à la réplique inopinée. Bref, avec ce scénario, bancale, le réalisateur ne semble pas y mettre beaucoup de cœur. Cependant, pour le jeune Marcus et le médium George, le problème n'est ni dans la crédibilité ni dans le déséquilibre. D'abord leurs interprètes sont très bons - Matt Damon est somptueux une nouvelle fois - mais le film aurait du peut-être ne s'attacher que sur eux. Malheureusement, les personnages peinent à prendre une réelle épaisseur tant la forme du film, d'une durée déjà conséquente, ne peut le leur permettre. Ainsi, les relations entre Marcus et sa mère, ou entre Matt Damon avec son frère ou, pire, avec Bryce Dallas Howard dégagée après trois scènes, n'émeuvent pratiquement jamais. Il y a tout de même quelques touches de grâce qui semblent flotter ici et là, un peu comme ces images latentes de l'au-delà, mais surtout cette rencontre entre les deux protagonistes, enfin percutante au bout de deux heures.
Eastwood ne perdra pas tout le monde sur le bas-côté, ne serait-ce que dans sa façon de filmer Damon, souvent en cadrage serré, avec toujours beaucoup de respect et d'humilité de metteur en scène. Pour le reste, autant dire qu'il ne convainc malheureusement pas, même dans sa photographie aux nuances pauvres. Comme quoi, le cinéma c'est un peu comme au jeu : parfois on gagne, parfois on perd. Alors si Clint Eastwood essuie ici un échec considérable, soyons humbles à notre tour et pardonnons le lui déjà.
Réalisé par Clint Eastwood
Avec Matt Damon, Cécile de France, Thierry Neuvic
Film américain | Durée : 2h08
Date de sortie en France : 19 Janvier 2011