Récompensé à de multiples reprises dans différents festivals, La Vie des autres a été la consécration précoce de son réalisateur, Florian Henckel von Donnersmarck, alors sortit d'une école de cinéma. Écrit minutieusement en quatre ans, autant dans un soucis historique qu'émotionnel, le réalisateur a couché sur papier un film qui puise ses origines dans son enfance, marquée par un célèbre mur séparant l'Allemagne de l'Est à celle de l'Ouest. L'intrigue est simple : Dreyman, un auteur célèbre de la RDA, est surveillé par la Stasi qui le soupçonne d'entretenir, avec sa femme et leur entourage peuplé d'intellectuels, des idées contraires aux valeurs de la politique communiste en rigueur. Wiesler, un agent, est chargé de surveiller le couple par écoute, alors que leur appartement est rempli de micros.
A l'installation de l'intrigue, l'esthétisme du réalisateur s'impose d'ores et déjà : mise en scène simple et sobre, une lumière très travaillée harmonisant une photographie assez terne (comme l'apparente figure du protagoniste), une musique signée Yared sensible mais discrète... Florian Henckel von Donnersmarck accroche par son efficacité. La suite n'en est pas moins avantageuse. Merveilleusement ficelé, le scénario impose au spectateur un point de vue quasi unique. Wiesler, absent dans la maison de l'auteur, est pourtant là quelque part dans une cave, à écouter patiemment le moindre fait et geste. Homme d'honneur, fidèle défenseur de la politique communiste, le personnage dont les convictions guidaient rigoureusement la ligne de vie se heurte à un vide, une découverte insoutenable. Comment réagir lorsque le propre ministre du gouvernement que l'on représente s'avère être vile ? Peut-on simplement l'accepter ? La Vie des autres a cette intelligence folle de ne se reposer que sur l'évolution de son protagoniste, d'abord résolu dans ses convictions, et qui voit petit à petit ces dernières s'effondrer. Nier l'évidence serait tellement simple, mais aussi idiote que peut paraitre la phrase elle-même, sans doute est-il vrai que seuls les idiots ne changent pas d'avis...
Ulrich Mühe, que l'on regrette déjà, parvient à donner toute la dimension humaine dont avait besoin le personnage. De son air convaincu à sa perdition face à l'imprévisible vérité, Wiesler est l'ange gardien de tout le bien que l'on peut atteindre, faisant basculer réellement le film dans une universalité défiant le temps ; tout murs barbelés ou même d'artificielles frontières. Et malgré tout cela, l'espoir fou de rester un homme, capable de se remettre soi-même en cause, éternellement.
Presque soudainement, l'image se fige et le noir s'abat en nous laissant encore rêveur. Mais bientôt, après digestion, La Vie des autres s'impose bien comme une vraie réussite, aussi juste que tendrement optimiste.
Réalisé par Florian Henckel von Donnersmarck
Avec Thomas Thieme, Martina Gedeck, Ulrich Mühe
Film allemand | Durée : 2h17
Date de sortie en France : 31 Janvier 2007
11 août 2010
La Vie des autres
00:42
Jérémy
6 avis gentiment partagé(s):
Un film que je cite très souvent dans mes conversations tant son esthétique, son propos m'a marqué... Dommage que l'acteur principal soit mort juste après...
Le meilleur film de 2007, pour moi...
: )
J'ai aussi beaucoup aimé ce film ! La musique reste gravée dans la mémoire, les yeux tristes de Mühe émeuvent... ça marche, tout simplement ! Par contre, ma mémoire me fait peut-être défaut, mais ce n'est pas dans le grenier que Wiesler espionne ? Bon, peu importe, c'était dans un endroit sombre en tout cas ^^
Comme tu le dis, c'est tout simple, mais ça marche.
En ce qui concerne l'endroit, héhé, tu me fais hésiter...
Quand j'ai écris le mot "cave", j'avais en tête cet endroit sombre et reculé, assez lugubre. Mais peut-être est-ce dans le grenier de l'immeuble (ce qui serait plus logique, non ?). Si j'ai l'occasion, je vérifierai mais je pense que tu as tout à fait raison :) .
Génial ce film !
Le meilleur du cinéma allemand, avec les blagues que l'on retiendra et les émotions entraînées.
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