16 avril 2010

The Reader

Adapté du célèbre roman de Bernhard Schlink, The Reader s'est incontestablement imposé comme l'un des films de l'été 2009. Mais les avis sont loin d'être homogènes : chef d'œuvre incontestable pour certains, pour d'autres le film - comme le livre - apporte une lecture douteuse et dérangeante de l'un des pires épisodes de l'Histoire humaine. Il est vrai que le risque n'est pas des moindres : une des protagonistes du film est une femme ayant travaillé pour les SS dans un camp de concentration.
Si The Reader divise l'opinion, il n'y a aucun mystère. Dès le début, le film annonce clairement qu'il a pour but de mettre à l'épreuve son spectateur. Croisement des époques dans un raccord regard assez subtile (thème qui semble cher au réalisateur qui croisait déjà les époques dans The Hours), pourtant le doute plane quant à un pathos trop présent sur la suite du récit. Mais le montage, efficace, parvient à instaurer au film une certaine sobriété. Daldry fait attacher son spectateur à ce jeune homme, tombé amoureux au hasard d'une ruelle, et bientôt à cette femme, plus vieille mais d'une sensualité et d'un naturel évident. Cette identification marche, rendant The Reader d'autant plus dérangeant... et finalement pertinent. L'ellipse temporel passée et l'annonce de la vérité sur cette femme faite, nous sommes égale à égale avec Peter : comment dissocier ses sentiments vécus et la prise de conscience de son ignorance ? Comment pardonner quand on ne peut oublier ? Car c'est bien du côté des bourreaux que notre moral se percute...
Le film pose des questions, et ne semble pas y répondre de lui-même. D'ailleurs le thème va beaucoup plus loin que cette histoire d'amour vécue entre une ex SS et un jeune homme allemand, qui est totalement fictive. Le décalage d'âge est bien l'allégorie de cette frontière qui existe entre une génération qui a vécu la guerre et, par collaboration ou inaction, a en grande partie joué un rôle dans le génocide juif. Comment apprendre des choses par des professeurs qui font eux-mêmes partie de cette génération ? Comment et pourquoi respecter nos propres parents ? Le Peter adulte, magnifiquement interprété par Ralf Fiennes, apporte cette complexité au récit par la complexité de son propre personnage. Quant à Kate Winslet, en grossissant les traits de son personnage d'abord intouchable puis peu à peu fébrile jusqu'à la vulnérabilité, elle brille et étonne encore.
The Reader n'est pas un regard sur le passé, mais sur un présent encore d'actualité, qui s'adresse et continuera de s'adresser aux générations futures. Ne pas oublier les erreurs du passé est une façon de croire encore à l'humain. Cette histoire littéraire ou adapté cinématographiquement ne fait qu'accroître cette foi en ce que nous sommes et pouvons faire... le pardon étant ici l'interrogation principale, et non pas une solution évidente. Car rien est évident et ce serait mal interprété le film de dire qu'il prône l'évidence de pardonner. S'il prône quelque chose, alors la réflexion et l'espoir en ferait plutôt partie. Et heureusement.


Réalisé par Stephen Daldry
Avec Kate Winslet, Ralph Fiennes, David Kross
Film américain, allemand | Durée : 2h03
Date de sortie en France : 15 Juillet 2009

2 avis gentiment partagé(s):

dasola a dit…

Rebonjour, le roman de Schlink est vraiment bien. Cette adaptation ciné est honnête: David Kross est en tout point remarquable face à Kate Winslet. C'est vraiment un beau film sur un sujet douloureux. Bonne journée.

Jérémy a dit…

Nous sommes donc d'accord, Dasola :) .
Il est vrai que le roman est magnifique et méritait une adaptation à sa juste valeur.

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